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Ca veut dire quoi, « réussir sa vie » ?





Au lycée, ma définition d'une vie réussie, c'est ma copine Rachel

La fille populaire, belle, sympa et rigolote qui fait fondre le cœur des garçons et dont toutes les filles veulent être la meilleure amie. Rachel a toujours eu tout pour elle, et même en grandissant : elle monte sa boîte à 30 ans, achète un appart avec son mec dans un chouette quartier à Paris et puis, boum, bébé. Tous les rêves de sa liste cochés ! Sur le papier en tout cas.

Mais depuis que Rachel est dans cette vie parfaite, elle a perdu son éclat et ponctue chacune de ses phrases par des “mais bon…”.

“Oui, en ce moment avec mon mec, c’est pas l'amour fou, mais bon, c’est normal au bout de trois ans…” “Oui, j’ai un peu lâché ma boîte, mais bon, l’achat de l’appart, c’est un gros projet…” “Oui, mes amies me manquent, je suis au bout du rouleau, j’ai mis mes rêves de côté mais bon, un bébé ça chamboule tout…”


Alors, quand un matin je reçois ce SMS de sa sœur : "“Il faut qu’on parle de Rachel, elle déraille complet !”, je m'inquiète : “Me dis pas qu’elle est de nouveau enceinte ?!” Mais sa sœur m’annonce que Rachel quitte son mec et je lâche spontanément “ah ouf !”. Réellement, c’est tout ce que je lui souhaite : retrouver son éclat, reprendre les rênes de sa vie, sortir de sa résignation. Mais sa sœur n’est pas du même avis : “Comment ça “ouf” ! Et la petite, t’y penses ?!”


Là où moi je vois le risque et le courage, la sœur de Rachel voit la lâcheté et la résignation.

Pour comprendre, je rembobine vers l'enfance...


Derrière nos réactions, il y a notre éducation, nos croyances, nos expériences passées ou récentes qui viennent nous dire ce qui est bon et ce qui ne l’est pas. Mais on oublie souvent que ce qui est bon pour nous ne l’est pas forcément pour notre amie, notre enfant, notre communauté… Et on oublie aussi qu’on ne part pas tous du même endroit, ni avec le même bagage ni les mêmes outils.


Après le décès de notre mère, mon frère et moi avons été élevés par notre père. Il s’est donc retrouvé seul avec ses deux enfants. Aujourd’hui encore, mes amis, mes oncles et tantes, les amis de mes parents me disent comme il a été courageux et à quel point ça a dû être éprouvant de se retrouver dans cette situation.


Par contre, Rachel ferait la plus grosse erreur de sa vie en élevant son enfant seule. Dans un cas, il s’agit d’une situation subie, dans l’autre, d’une situation choisie. Et c’est là toute la différence qui change aussi notre perception : sur l’échelle de la réussite, Rachel raterait sa vie de famille alors que mon père aurait été courageux et fait du bon boulot.


On oublie le courage que cela demande d’écouter son cœur, de suivre son intuition, quand tout autour vous incite à rester sur « le bon chemin ».

Quitter une situation confortable, baisser son niveau de vie, jongler entre sa carrière, son rôle de mère, son statut de célibataire tout en faisant face aux commentaires et aux a priori que l’on aura sur ses choix… Tout cela n’a rien d’un échec mais plutôt d’un acte de courage et de dignité.


Plus jeune, je projetais la réussite sur les autres...


Avec mon père, mon frère et moi, on n’a pas eu le choix et quand on n’a pas le choix, on se pose moins de questions. On fait, on avance, on décide. Il ne s’agit plus de savoir ce qui serait la meilleure option. Non, je n'ai pas raté ma vie parce que j’ai grandi avec un parent en moins. Mon père non plus parce qu’il a élevé seul ses enfants.


Pourtant, je me rappelle qu’à l’école, quand il fallait remplir les petites fiches d’info, j'appréhendais toujours que ma voisine de bureau regarde ce que j'inscrirais dans la case “profession de la mère”. Parce que j’écrivais “décédée” et que j’avais un peu honte. Ça faisait de moi une enfant différente, une enfant qui n’avait pas un chemin de vie classique. L’école primaire nous met dans le bain tout de suite. On se souvient des copies distribuées par le prof, de la moins bonne à la plus glorieuse. Ça nous colle dans un groupe : celui des nuls ou celui des brillants. Et même si on sait bien que nos lacunes en fractions et en géographie ne détermineront pas l’intégralité de notre avenir, ça nous dit quand même pas mal de choses sur la manière dont on traite le sujet de la réussite.


La réussite, c’est l’ambition, les bonnes notes et le fait de gagner. La réussite, c’est le combat, la sueur au front et dire : “T’as vu, je l’ai bien méritée, ma revanche sur la vie”.

J’avais un ex qui à tout bout de champ disait : “On a gagné”. Quand on regardait un coucher de soleil, quand il obtenait un gros projet dans le travail, quand on a trouvé un super appart... Ça a l’air anodin comme ça, mais derrière ce “on a gagné”, il y avait toute sa colère, sa rancœur, ses démons du passé.


Il n'avait pas eu une enfance facile et chacune de ses actions était désormais tournée vers la vengeance. “Tout sauf la facilité”, il disait aussi. Alors il se mettait en danger, il vivait pour le grandiose et l’absolu. Moi, j’avais les yeux qui brillaient et je me trouvais toute petite à côté. Il avait réussi à me persuader que je restais dans ma zone de confort et que je manquais d’ambition avec mes envies de routine, de calme et de simplicité. Jusqu’à ce que je me rende compte que, lui, sa zone de confort, c’était le danger et que j'avais le droit de choisir autre chose pour moi.


Ça m'a demandé du temps de voir ça chez lui, et du temps pour réaliser que je me diminuais dans une vie qui n’était pas la mienne. Au début, on suit le mouvement. On entend les “mais bon” sans les entendre. Et puis un jour, ils résonnent un peu plus fort. On fait une rencontre déterminante, on lit un livre ou on voit un documentaire, et on prend conscience que d'autres perspectives sont possibles. Ou on arrive à bout, on n'en peut plus et on finit par trouver une force insoupçonnée en nous.


Une force qui demande une chose toute simple et pourtant si difficile : s’écouter.

Et si le secret était déjà de sentir en soi ce qui se passe. De s’écouter plus, sans forcément agir tout de suite. Écouter et reconnaître que quelque chose se passe. C’est ce qu’on appelle l’intuition. Ça se manifeste différemment chez tout le monde, un creux au fond du ventre, un nœud dans la gorge, un frisson qui nous traverse… Quelque chose qu’on sent et qui nous dit “c’est juste”. Même quand rien n’est rationnel et que tout devrait nous pousser à faire un choix différent.


Faire le choix juste, c’est aussi renoncer. C’est renoncer à vouloir construire un empire, gagner des millions, devenir meilleure. C’est accepter qu’on est bien là et arrêter de voir ça comme un manque d’ambition ou de la passivité. C’est rester là où on est, sans chercher à aller vers le “toujours plus grand, toujours plus fort”.


Elle est là, notre réussite, dans l’alignement des fréquences en nous.

Comme quand on cherche à capter la radio dans la voiture et qu’à force de titiller le bouton, on tombe sur cette chanson qui nous accompagne sur la route des vacances. Ces chansons-là ont un petit goût de victoire, on ne les a pas trouvées tout de suite, on a dû prêter attention à tourner le curseur, à revenir en arrière pour finalement, BIM, capter la bonne fréquence.


J’ai relu ce livre fabuleux d’Eckhart Tolle Le Pouvoir du moment présent (J'ai Lu). Je l'ai depuis longtemps, pourtant c'est cette année seulement que j’en saisis le sens. Pourquoi maintenant ? Car c’était le bon moment. Après les doutes, les peurs, les échecs, les abandons, les luttes. Et tout ce qui vient avec : les rires, les joies, les soulagements, les étreintes, les nouvelles rencontres, les amours, les aventures…


En terrasse avec une amie, je lui parle de ce poids constant qui ne me quitte pas. De cette impression d’être toujours à côté. De me sentir entre le “j’aime ma vie” et le “j’ai envie de plus”. Elle me dit alors quelque chose qui va résonner : « Tout ne s’arrange pas comme ça parce qu’on le décide. La seule chose que tu peux te demander c’est : “Est-ce que ce que je vis me procure de la joie ?”. »


Je manque d’éclater de rire : pas si simple d’aller chercher la joie, quand on vient de se faire larguer, qu’on est fauché et à deux doigts de la crise de nerfs… Mais elle continue : “II ne s’agit pas de faire semblant en se persuadant que tout est super, simplement de se poser sincèrement la question. Et de voir ce qui se passe.”


Est-ce que, là, maintenant, tout de suite, ce que je suis en train de vivre me fait du bien ?

Si la réponse est oui, je reste et je savoure. Si la réponse est non, d’abord j’accepte, et c’est déjà pas mal, ensuite, j’essaie de me demander pourquoi je continue à m’infliger ça.


Et puis, si je suis bien armée, je passe à l'action. Sinon, je demande de l’aide : à une thérapeute, à un proche ou pourquoi pas à l’Univers. Demander de l'aide, c'est faire un pas vers soi.


Ce ne serait pas ça, déjà, le chemin de la réussite ?





 

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